Articles

Affichage des articles du mars, 2025

Contre le mépris du droit

Disons-le sans ambage, la plus tragique erreur que nous puissions commettre serait de nous accoutumer au pire. Trop longtemps, les nations qui se faisaient les défenseurs de la démocratie et des droits de l’Homme ont eu des indignations à géométrie variable. Leur crédibilité s’en est trouvée fortement abîmée, et c’est certainement l’une des principales raisons de la situation où nous sommes parvenus : trois empires à prétentions coloniales – la Russie, la Chine et, à présent, les États-Unis (mais aussi leur alliés, tel Israël) –, foulent aux pieds le droit international et les droits humains sans qu’au sein du monde dit « libre » des voix assez fortes puissent les en empêcher. De prétendus « réalistes » qui ne connaissent rien aux réalités, vous diront que plaider pour la paix face à un fauve en rage n’a aucune espèce d’efficace. Ils prêcheront la militarisation, l’escalade de la puissance, la guerre ou vous conseilleront tout simplement de faire le mort, d’...

Perdre la mémoire, perdre la raison

Des deux côtés de l’Atlantique, se joue une guerre des mémoires. Donald Trump a demandé à l’armée américaine de supprimer de sa base de données des dizaines de milliers de photographies mettant en scènes des soldats racisés. En France, le souvenir de la guerre d’Algérie suscite – une fois de plus – des polémiques enflammées autour des exactions françaises que certains cherchent à cacher. Nulle volonté de comparaison entre les deux cas, qui ressortissent de contextes différents, d’acteurs singuliers et d’actes spécifiques aux conséquences diversement dangereuses. Mais nul ne pourrait prétendre que l’histoire n’est pas un champ de bataille et que les néofascistes de tous les continents en font une arme pour contrôler les mémoires et infléchir le sens de l’aventure humaine au service de leur idéologie. En France, Éric Zemmour, qui passe – à tort – pour un fin connaisseur de l’histoire, avait révélé son projet révisionniste en arguant de la nécessité d’imposer à toutes les têtes u...

Comment le RN instrumentalise la cause des femmes

Dans sa stratégie de conquête du pouvoir, le RN a bien compris que s’attacher le vote des femmes était un enjeu capital. C’est pourquoi, celui a tenté d’infléchir son discours traditionaliste et de se présenter comme un parti défendant les femmes. Si Marine Le Pen ne se dit pas ouvertement féministe, elle indique cependant « comprendre les femmes, parce qu’[elle] en [est] une ». Argument un peu court mais qui se double d’une véritable offensive contre le danger que représenterait l’immigration pour les femmes ; discours qui semble trouver un écho. Pourtant, les élus du RN se montrent bien loin de défendre la cause des femmes dans leurs votes à l’Assemblée nationale ou au Parlement européen. Une fois de plus, on nage en pleine hypocrisie et en plein mensonge. Dans la nébuleuse néofasciste mondiale, les discours traditionalistes assignant les femmes au rôle d’épouse et de mère au foyer ou dénigrant les mouvements féministes accusés de nuire à la virilité des hommes ...

1984 au XXIe siècle

Après qu’il ait abondamment fustigé la « cancel culture » et la « censure », qui menaceraient la liberté d’expression, n’est-il pas déconcertant de voir Donald Trump mener une offensive massive et radicale contre certains mots ? On voit par là que la défense de la liberté d’expression par les néofascistes est cynique et mensongère. Il ne s’agit pas tant de défendre la liberté que d’imposer une conception du monde. Plusieurs décrets du président des États-Unis ont, en effet, banni ou déclaré suspects plus d’une centaine de mots. Cette démarche n’est évidemment pas sans rappeler l’imposition d’une « novlangue » par les dirigeants d’Océania, dans le roman de George Orwell, 1984. Interdire l’usage de certains mots conduit à l’impossibilité de penser. Le régime totalitaire décrit par Orwell, cherchant à se prémunir contre toute forme de contestation, veut au final empêcher la possibilité même de tout discours critique. Ce n’est don...

Il faut défendre les institutions

Lorsque le Conseil constitutionnel a rendu son jugement sur la loi « Immigration-Asile », le jeudi 25 janvier 2024, certains ont cru habile de parler de « camouflet et démocratique » (Eric Ciotti) ou encore de « coup d’État de droit » (Laurent Wauquiez). Ces propos sont d’une gravité extrême tant ils tendent à jeter le doute sur nos institutions, ouvrant ainsi la possibilité d’un rejet populaire de celles-ci qui pourrait conduire au pire, c’est-à-dire à la fin des garanties qui permettent l’effectivité de nos droits et libertés et, même, la pérennité de la démocratie. Ces propos irresponsables et populistes nous autorisent à nous demander si Les Républicains (LR) sont encore des républicains, s’ils sont encore attachés aux principes les plus hauts qui fondent notre République. Emmanuel Macron, en laissant cette loi être présentée en l’état devant le Parlement, n’a pas fait seulement le calcul cynique de se reposer sur le Conseil constitutionnel pour la censurer, il a m...

Principes contre valeurs

Si les multiples composantes de la droite et de la gauche ont chacune des valeurs, parfois résolument divergentes, la République et l’ordre international reposent sur des principes. U ne valeur peut toujours être opposée à une autre, se voir valorisée ou dévalorisée ; les principes, quant à eux, constituent le socle intangible sur lequel repose la civilisation, car ils garantissent la dignité de toute femme et de tout homme. Lorsque des politicards ou des oligarques s’emparent, plus ou moins démocratiquement, du pouvoir pour le mettre au service de leurs intérêts contre ceux de l’Humanité, lorsqu’ils choisissent selon leur bon vouloir ceux qui ont droit d’exister et ceux qui sont « de trop », lorsqu’ils sapent les principes d’égalité et de respect de l’humanité en l’Homme, ceux-ci doivent apparaître pour ce qu’ils sont : les nouveaux barbares de notre temps. La dignité humaine est le fondement « sacré », pour reprendre l’expression forte et juste d...

Le nouveau désordre mondial

Les différents événements – très commentés – qui ont secoué les relations internationales ces derniers jours, que ce soit la vive altercation entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale, le gel de l’aide militaire américaine à l’Ukraine qui a suivi ou la manière dont le président des États-Unis soutient Israël et voit l’avenir de Gaza, ne sont que les conséquences logiques d’une conception des relations interétatiques fondées sur le rapport de forces et, même, plus précisément, sur la violence. Une nouvelle ère géopolitique commence-t-elle, qui conduirait à rebattre les cartes diplomatiques voire à changer les règles du jeu ? L’incongruité des événements précités, la morgue de Donald Trump, son caractère fantasque et ses idées surréalistes (qu’on songe ne serait-ce qu’à celle de faire de Gaza une nouvelle Riviera) comme leurs conséquences cataclysmiques en termes de relations internationales (redéfinition des alliances, des conflits, de la désignation de...

Un nouveau capitalisme ?

  Avec Donald Trump et Elon Musk, mais aussi Giorgia Meloni et Viktor Orban ou encore Javier Milei se met en place une véritable « internationale néofasciste » dont l’un des aspects les plus fondamentaux consiste en un nouveau rapport à l’économie. Loin d’enfermer leurs pays dans un repli nationaliste, il s’agit davantage d’acter la « sécession des élites » dans une vision libertarienne et prédatrice des rapports entre États. C’est assurément la fin de la « mondialisation heureuse » que les libéraux nous avaient promise. Mais est-ce pour autant la fin du libéralisme économique ? Les néofascistes sont-ils, sur le plan du commerce, des nationalistes partisans de la fermeture des frontières et d’une politique économique défensive ? La volonté de Donald Trump d’infliger à ses concurrents des taxes douanières exorbitantes pourrait le laisser penser. Pourtant, c’est tout le contraire. Dépecer l’État est l’une des ambition d...