Des intellectuels libéraux contre la science et la démocratie
Mesure-t-on tout ce que cela a de sidérant de bêtise et d’inquiétant pour les droits à l’information, à la culture et à la science, garanties d’un débat démocratique efficient ?
Des éditorialistes, écrivains, journalistes libéraux, qui se présentent comme les hérauts de la liberté d’expression et de la nuance, s’allient de facto avec les pires néofascistes pour mettre un terme à ce que la « démocratie Internet », pour reprendre l’expression du sociologue Dominique Cardon, a peut-être produit de meilleur : une encyclopédie en accès libre, reposant sur une rédaction collaborative et démocratique, assez comparable finalement avec le débat tel qu’il peut être mené dans les sciences.
Wikipédia est l’une de réalisation collective issue directement de la « philosophie » d’Internet. Les créateurs du premier Internet, l’Arpanet, ayant délibérément, pour éviter que les communications ne puissent être coupées, créé un réseau dépourvu de centre ou de sommet, un réseau parfaitement « démocratique » où chaque utilisateur est « à égalité » avec les autres. Or, au-delà des accusations de partialité et de « wokisme », c’est bien cela qui est visé : l’absence d’autorité, de hiérarchie, de contrôle, de pouvoir… en somme : la démocratie elle-même !
Mais c’est aussi la connaissance et la science qui sont attaquées : s’il n’y a plus de débat, il n’y a plus de science, si on choisit les connaissances sans débat, selon ce qui nous arrange idéologiquement, il n’y a plus de vérité.
Cette collusion inédite entre des parangons du libéralisme – certes de plus en plus autoritaire dans son expression politique en France et d’autres démocraties –, et ceux qui cherchent à imposer sur toutes les ondes, réseaux sociaux ou médias, les idées les plus nauséabondes, racistes, homophobes, misogynes, islamophobes ou antisémites, qui sont à la racine de la propagande néofasciste, ouvre la voie à un rétrécissement de la diversité des opinions dans la sphère médiatique mais aussi des connaissances, du savoir et constitue finalement à la fois une nouvelle inquisition et une attaque contre la démocratie.
C’est la liberté d’informer, la liberté d’apprendre et de forger ses opinions, et, au final, la démocratie qu’il s’agit de saper. Le virage autoritaire des femmes et hommes politiques libéraux trouve son expression médiatique et «intellectuelle » chez ceux qui auraient dû nous en prémunir, à savoir ceux dont c’est le métier de penser.
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